Le refus d’une visite du domicile du salarié ne justifie pas le refus du télétravail préconisé par le médecin du travail

L’employeur peut-il s’opposer à la mise en place du télétravail préconisé par le médecin du travail au titre d’un aménagement de poste au motif que le salarié refuse la visite de son domicile pour vérifier le respect des règles de sécurité et les conditions de travail ?

 

Illustration. Le médecin du travail a préconisé la mise en place du télétravail deux jours par semaine au domicile d’une salariée assistante de service social d’une caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) au titre d’un aménagement de son poste de travail pour lui permettre une reprise du travail dans des conditions compatibles avec son état de santé. L’employeur a demandé à la salariée à visiter son domicile pour vérifier qu’il était conforme et respectait les règles de sécurité et les conditions de travail. La salariée ayant refusé de donner l’accès à son domicile au nom du droit au respect à l’intimité de sa vie privée et familiale, l’employeur s’est opposé à la mise en place du télétravail. La salariée a réclamé en justice des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Question. L’employeur manque-t-il à son obligation de sécurité en décidant de s’opposer à la mise en place du télétravail préconisé par le médecin du travail en raison du refus du salarié de laisser visiter son domicile pour vérifier que celui-ci est conforme aux règles de sécurité et aux conditions de travail ?  La Cour de cassation a répondu à cette question dans un arrêt du 13-11-2025. 

Décision de la cour d’appel. En appel, les juges ont rejeté la demande de la salariée.  Ils ont considéré que l'absence de mise en place du télétravail, préconisée par le médecin du travail était imputable à la salariée, car elle avait refusé à l’employeur le droit d’accéder à son domicile. Par ailleurs, ils ont reproché à la salariée d'invoquer un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité alors qu’elle ne produisait aucun de ses arrêts de travail, ni aucun certificat médical pour justifier sa pathologie. Dans ces circonstances, les juges ne voyaient pas en quoi l'employeur manquait à son obligation d'assurer sa sécurité et protéger sa santé physique et mentale. La salariée a formé un pourvoi en cassation.

Droit du salarié de refuser l’accès à son domicile. La Cour de cassation a censuré l’analyse des juges. Elle a d’abord rappelé le principe que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale et de son domicile. En conséquence, l'usage fait par le salarié de son domicile relève de sa vie privée et il est en droit d'en refuser l'accès.

Pas d’opposition au télétravail en raison de ce refus. Ensuite, elle a jugé que l’employeur, qui est tenu de prendre en compte les avis, les indications ou propositions émises par le médecin du travail et qui n'a pas exercé le recours contre les préconisations du médecin du travail, prévu par l'article L 4624-7 du Code du travail, ne peut pas refuser la mise en place du télétravail préconisé par le médecin du travail au titre d'un aménagement du poste au seul motif que le salarié a refusé une visite de son domicile par l'employeur. Dans cette situation, l’employeur manque à don obligation de sécurité. L’arrêt de la cour d’appel est donc annulé pour avoir violé les articles L 4121-1, L 4121-2, L 4624-3 et L 4624-6 du Code du travail

 

Source : Cass. soc. 13-11-2025, no 24-14.322

© Lefebvre Dalloz

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